mercredi 16 avril 2008

LE PREMIER MINISTRE ÉDOUARD ALEXIS N'IRA PAS SEUL ...

Alexis n'ira pas seul

Jean-Erich René

La crise politique actuelle loin de se dénouer va connaître d'autres décours. Jacques Edouard Alexis tôt dans la matinée du mercredi 9 avril 2008avait donné sa démission verbalement au Président René Préval. Mais le dernier mot revenait à Mme Alexis qui était en voyage et qui a éclaté de colère en apprenant cette nouvelle de la bouche de son mari au téléphone.

Aussi s'est elle empressé de regagner le pays en fustigeant vertement le Premier Ministre qui était venue l'accueillir à l'aéroport. Après une conciliabule entre Me et Mme Alexis, un ministre et le secrétaire général de la Primature, on a fini par convaincre Alexis de ne pas remettre sa démission. D'où le retard qu'a pris René Préval pour prononcer son discours d'apaisement. Mais il a loupé le plus gros morceau qui était l'annonce de la démission de Jacques Édouard Alexis.

Mme Alexis est une vraie Marie Jeanne. A l'instar de Mademoiselle Sandrine de la Croix des
Bossales, un beau matin elle n'a pas hésité à descendre au Ministère de l'Éducation nationale pour tirer sa rigoise de son sac et rouer de coups une secrétaire qu'on accuse d'être la maîtresse de son mari. Elle ne lésine pas devant les moyens à prendre pour sauvegarder ce qu'elle a acquis à la sueur de son front. D'un juste courroux elle vole au secours du Premier Ministre en lui demandant de ne plus signer sa lettre de démission.

Le 28 février 2008 la Chambre des députés avait donné un vote de confiance au Chef du Gouvernement. Il n'y a plus de provisions légales pour accorder un vote de censure à son mari. Il s'agit d'un abus de pouvoir et d'un affront qu'on veut faire à son mari qui s'est tant fatigué pour faire de René Préval ce qu'il est devenu. Aujourd'hui il est payé en monnaie de singe. Les arguments de Mme Alexis sont judicieux. S'il est vrai que la destitution du Premier Ministre est un acte illégal et inconstitutionnel mais le renvoi du Sénateur Rudolph Boulos l'est aussi. Il s'agit d'un antécédent malheureux que Jacques Édouard Alexis devait éviter.

La sociologie haïtienne nous enseigne qu'il ne faut jamais apprendre à un singe à lancer des pierres. Vous serez sa première victime. En effet Alexis ne s'attendait pas à se retrouver aussi vite sur le banc des accusés, devant les mêmes macaques qui viennent de manger sa banane et qui se réjouissent de lui casser froidement la tête. En Haïti le pouvoir qu'il soit économique ou politique est attaché à un fil d'araignée. Dans l'espace d'un cillement on peut tout perdre, maison, voiture, magasin etc. Tout le monde est passible du supplice du collier. Même Palais National est sujet au déchouquage . Vaut mieux faire preuve de sagesse dans l'exercice des fonctions publiques en observant les codes de loi.

La résistance de Mme Alexis et sa farouche détermination à porter son mari à garder son poste sont justifiées par le fait qu'elle dirige une Fondation financée à même les caisses de l'État.
Elle sera très embarrassée si on lui demande compte de sa gestion. Elle doit surtout éviter de faire le gros dos puisque sa moustache est encore blanche du lait de la Primature. Mimi est un très beau nom mais c'est ainsi qu'on nomme tous les voleurs. Si la Prima Dona insiste et persiste, le Commissaire Claudy Gassant si prompt au devoir bientôt lui décernera un mandat de comparution afin de donner des explications sur cette caisse noire de la Primature qui devrait servir au lancement de la candidature de Jacques Edouard Alexis. Ce même Pot de Chambre
qui lui avait donné un vote de confiance le 28 février et qui vient de le renvoyer le samedi12 avril va dresser une mise en accusation en bonne et due forme. Le PM se présentera devant la Haute Cour de Justice. Il n'y a pas de demi-mesures en politique haïtienne ou bien on est IN ou bien on est OUT.
Le refus de Jacques Edouard Alexis de laisser la Villa d'Accueil va compliquer la situation.
Jacques Edouard Alexis n'est pas un enfant de chour. Il fut l'artificier de la bombe qui avait paniqué le cortège présidentiel dans les environs de la Cathédrale peu de temps avant le
départ de Jean Claude Duvalier. Il est impliqué avec Paul Déjean dans l'explosion qui a eu lieu en décembre 1990 sur la route de Pétion-Ville lors des campagnes de Jean Bertrand Aristide. Pyromane il l'est! Il est l'auteur intellectuel de la prise de l'hôtel Montana pour exiger du CEP la publication des résultats des élections et déclarer René Préval vainqueur avec les votes blancs interdits par la loi. La Constitution de 1987 est-elle un accordéon que l'on ouvre et ferme à volonté pour écouter la musique que l'on désire. Aujourd'hui il revient au Premier Ministre de récolter ce qu'il a lui-même semé c'est-à-dire l'inconstitutionnalité des décisions politiques.

Fort de son passé d'activiste et doublé d'une femme qui n'a pas froid à l'oeil, Jacques Edouard Alexis refuse de jeter ses gants. Ce n'est pas l'argent qui lui manque ni des sicaires. Son alliance avec les diplomates du béton n'est un secret pour personne. Cette accalmie apparente de ce week-end est encore plus dangereuse. S'agit-il d'un retrait stratégique?Il est un fait certain qu'il y aura du grabuge. La confrontation est inévitable. Les Ambassades américaine, française et de presque tous pays accrédités en Haïti ont émis un communiqué annonçant la fermeture des services consulaires jusqu'à nouvel ordre. Elles demandent à leurs ressortissants de surseoir leurs voyages sur la terre volcanique d'Haïti. Pourquoi toutes ces précautions si elles n'avaient pas flairé l'odeur d'un éclatement au TNT ou Trinitrotoluène? Le torchon brûle entre Jacques Edouard Alexis, René Préval et Jean Bertrand Aristide.

Le Premier Ministre déposé n'entend pas avaler cette couleuvre. C'est l'effondrement total de son projet de succession. Le Président proclamé René Préval qui avait fait pourtant la promesse formelle au Club de Bourdon de faire d'Alexis son dauphin a maintenant son propre candidat. Les hommes politiques sont le plus souvent sincères mais sous la pression des circonstances ils se voient obligés de changer d'attitude, affirme Toussaint Louverture pour expliquer son revirement dans le camp des Français. Le Président kidnappé Jean Bertrand Aristide ne s'en remet pas encore de sa blessure et entend jouir de son droit d'aînesse. De son lointain exil africain par remote control il dirige les événements politiques haïtiens.

Les manifestations contre la faim ont vite pris une vitesse turbo sous la patine de ses lieutenants : Père Jean Juste et Sô Anne. En un temps record cette puissante machine de destruction a réduit en masure la résidence du PM, les maisons avoisinantes et certains magasins. Les cyclones qui frappent ordinairement Haïti n'ont jamais eu une telle ampleur ni commis de tels dégâts dans un délai aussi court. Le fauteuil présidentiel devient une chaise musicale autour de laquelle rodent avec astuce les prétendants qui se bousculent. Le premier qui y aura déposé son séant sera le vainqueur. Dans leurs sarabandes ils ne se rendent pas compte de la présence d'un émissaire américain, délégué sur place pour arbitrer ce match qui s'annonce trop passionné et trop dangereux pour le reste du Corps Social. Le peuple nécessiteux meurt de faim dans l'indifférence de ses dirigeants politiques. Si la décision illégale de la Chambre des Députés a renvoyé Alexis mais la famine le principal objet de sa contestation demeure encore.

Le Président René Préval est dépassé par l'ampleur des événements. Au nom de la morale sociale, ce spectacle devient inacceptable aux portes de l'Amérique. Tous les écrans du Monde projettent le drame qui se déroule en Haïti mettant nos ressortissants de la diaspora dans des
postures vraiment difficiles sur leurs lieux de travail. En voulant tout avoir ils vont tout perdre. Alexis jure qu'il n'ira pas seul.
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vendredi 4 avril 2008

ÉMEUTES DE LA FAIM


Jean Erich René

En Haïti nous n’avons pas la bonne habitude de faire des sondages
d’opinion afin de juger du niveau de satisfaction et d’insatisfaction de nos
administrés. Le seul trait de jauge c’est l’éclatement. LESPWA, un
Partimonté à la va-vite pour porter in extremis Préval à la présidence,
manifeste des signes d’incapacité. C’est la déception complète de la
population atteinte de la nostalgie du statu quo ante. Avec la vie
chère et
l’inflation, la fracture sociale s’agrandit de jour en jour. Le
Gouvernement n’entreprend rien pour la colmater. Ce déséquilibre stable
a
comme pesanteur la coalition des Partis Politiques qui jouissent de
certains avantages sociaux et économiques. Grâce aux prébendes
accordées
aux condottieres (déchouqueurs), les manifestations populaires se sont
tues.


Pour se moquer de ses contestataires, René Préval se disait prêt à
gagner
les rues avec sa pancarte pour protester, lui aussi, contre la vie
chère.
Grande fut sa surprise d’apprendre que les populations des Zones
défavorisées des Cayes et des Gonaives se sont soulevées contre
l’indifférence du Gouvernement. La simultanéité des deux événements
pour
les mêmes motifs traduit un raz le bol. Ces émeutes de la faim peuvent
se
transformer en une insurrection générale. Rome brûle Néron s’amuse.
Tandis
que le Peuple meurt de faim, René Préval se prélassait le week-end
dernier
sur une plage des Cayes avec sa maîtresse. Voilà l’étincelle qui a mis
le
feu à la poudrière. A deux reprises pour s’absenter du pays et prendre
ses
ébats amoureux avec sa dame de cœur, René Préval, a mésusé de son
bulletin
de santé, comme alibi. La Chancellerie Haïtienne, comme au théâtre, a
pris
un communiqué pour annoncer le départ du Président pour raison de santé
tandis qu’il voyageait en compagnie de sa dulcinée pour visiter ses
parents
en Floride. Cette histoire d’amour a reformaté le profil du Chef d’État
haïtien qui voyage sans le protocole dû à son rang. Loger un
célibataire au
Palais national comporte de grands risques pour le pays.


Par ailleurs l’impuissance de Lespwa à résoudre les problèmes de
l’heure
n’échappe à personne. Le Président et le Premier ministre sont
unanimes à
déclarer qu’ils n’y peuvent rien. De tels aveux invitent à la remise en
question de la légitimité du pouvoir. Pour tromper l’attente des
chômeurs
le Gouvernement Préval Alexis fait appel à la diversion. On fait
miroiter
les possibilités d’exploitation de nos nappes pétrolifères. On requiert
les
services de certains soi-disant économistes pour faire mentir les
données
en tordant le coup à l’inflation, en faisant baisser artificiellement
le
taux de chômage et chanter une reprise économique fictive. Ces arnaques
ne
fonctionnent pas puisque la situation ne fait que s’empirer. On n’a pas
besoin d’être initié au secret de la météorologie pour savoir s’il
fait
chaud ou froid. La ménagère qui va chaque jour au marché mesure avant
nos
économistes l’effet de l’inflation sur son panier.


-une petite marmite de riz :19.50 gdes
-une petite marmite de maïs moulu:19.50 gdes
-une petite marmite de pois sec: 27.90 gdes
-1 livre de banane: 10.20 gdes
-1 livre de viande de bœuf : 59.70 gdes
-1 livre de viande de cabri : 75.90 gdes
-1 livre de poulet: 75.50 gdes
-1 livre de poisson frais: 86.80 gdes
-1 gallon d’huile comestible: 247.40 gdes
(source : Ministère de l’Économie et des Finances Février 2008)


La situation s’est aggravée au cours du mois de Mars. Le prix d’un sac
de
riz a augmenté de 52%%, le sac de sucre de 66,66% et le sac de mais
de
133,33%. Les familles haïtiennes sont aux abois. Manger devient un luxe
en
Haïti à cause de la cherté de la vie. Les faits et gestes de René
Préval ne
laissent augurer aucun espoir. Au contraire ils illustrent clairement
son
mépris. Préval ne se considère pas comme le Responsable qui doit
veiller à
la bonne marche des affaires du pays. Il prend souvent congé des
affaires
de la République pour faire des voyages d’agrément, sous le couvert de
son
cancer de la prostate. Préval se foute royalement de cette famine qui
sévit en Haïti que la majorité nationale baptise ironiquement de
«Grangou
Chlorox ».


Le mince pedigree de nos dirigeants explique leur inaction et
l’évocation
d’un miracle pour tirer le pays de cette situation difficile. Des
rancoeurs
commencent à se manifester contre l’Exécutif tout en s’amplifiant au
fil
des jours. Le PM Jacques Édouard Alexis est un technocrate de gros
calibre.
Détrompez-vous, si vous le croyez nul ! Nous connaissons bien l’homme.
Mais
par sa nullité feinte, il est en train de commettre les mêmes erreurs
que
certains Ministres d’État qui, rongés par des ambitions politiques
démesurées, se gardaient d’entreprendre certaines initiatives inscrites
dans l’agenda du Président Jean Claude Duvalier telles que: la
construction
d’une Cité Universitaire, le Drainage de Port-au-Prince et
l’assainissement
du Bicentenaire. Ils les réservaient pour leurs propres programmes
politiques. Hélas! Le pot au lait s’est brisé. «Adieu, veaux, vaches
cochons». En politique haïtienne, ordinairement l’astre entraîne dans
sa
chute tous les satellites qui brillaient autour de lui : Neptune,
Lafontant, Cinéas, Chanoine qui rêvaient le fauteuil.


Sans une certaine synergie entre les différents membres d’une même
équipe,
le rendement est minime et même nul. Le modèle de Gouvernement en
place en
Haïti exige une supervision directe du Chef qui malheureusement
n’affiche
aucune compétence. Un pis-aller serait d’avoir des collaborateurs
qualifiés
pour combler le vide institutionnel. Mais sans l’accumulation préalable
de
connaissances pertinentes et valides, sans l’intériorisation de
certaines
valeurs, sans une franche collaboration, l’identification des problèmes
et
leurs solutions deviennent un vrai casse-tête. Le mécanisme de
coordination
échoue et la barque nationale dérive avec 8.900.000 Haïtiens. Un Peuple
qui
a faim, par instinct de survie, coûte que coûte doit se ravitailler. La
faim chasse le loup du bois. Le Communiqué de la MINUSTAH accusant de
vandalisme les émeutiers de la faim des Cayes et des Gonaives est
incohérent. Les manifestants ont pillé des camions de nourriture et des
dépôts alimentaires. Il n’existe aucun recours collectif légal envers
une
population qui se déchaîne contre la faim. LA FILOUTERIE D’ALIMENTS
N’EST
PAS PREVUE PAR LE CODE PENAL HAITIEN. Ce n’est pas un crime parce que
ce
n’est pas un vol ni une escroquerie. Il s’agit d’une cause
d’impécuniosité
donc i l y a tout simplement grivèlerie. Avec un Parlement en
déconfiture,
une presse vendue, des Partis Politiques inféodés au Gouvernement, une
bourgeoisie salope, que faire? Cette mobilisation du Jeudi 3 avril qui
a
occasionné des scènes de pillage n’est autre que l’expression légitime
des
émeutes de la faim.